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Fleurs des ruines



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Coucy et Folembray étaient dans ce cas ; de temps immémorial l’une avait prétendu opprimer l’autre ; des flots d’encre avaient coulé entre les clercs pour régler les prérogatives ecclésiastiques des deux paroisses, des ruisseaux de sang avaient rougi les vertes campagnes pour décider de la suprématie des châtelains. Ces causes éteintes, d’autres étaient demeurées, entretenant une haine latente : Coucy était en haut, Folembray en bas ; l’une avait un château en mines, l’autre une usine en pleine prospérité ; l’une enserrée dans ses remparts était restée telle qu’au moyen âge, l’autre avec son industrie moderne prenait tous les jours plus d’extension ; l’une enfin était une ville, mais avec moitié moins d’habitants que l’autre qui était un simple village... Si ce ne sont pas là raisons suffisantes !

Pour la jeunesse querelleuse, c’était plus qu’il n’en fallait. Tantôt les gamins de Coucy descendaient provoquer ceux de Folembray, tantôt ceux de Folembray montaient défier ceux de Coucy ; c’étaient des batailles rangées où il y avait souvent des fronts fendus, des dents cassées, des membres éclopés et quand par hasard un imprudent s’aventurait seul sur le territoire ennemi il était bien rare qu’il ne lui arrivât pas de mésaventure fâcheuse.

Arthur Dourliac (feuilleton), La France militaire, le 24 janvier 1914


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La France militaire, le 24 janvier 1914